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Demain, j'arrête d'user mes miroirs (08/09)

 

 

Une tendance se fait jour outre-Atlantique, lancée par des blogueuses, qui consiste à cesser de regarder son reflet pendant une période déterminée. Objectif : ne plus être obsédé(e) par son image et regagner en estime de soi.

Il est aujourd'hui rare d'échapper à son reflet. Que ce soit sur un écran d'ordinateur, une fenêtre de train, le dos d'une cuiller ou la caméra frontale d'un téléphone portable, notre image est partout. Cette habitude de vérifier notre apparence sur toutes les surfaces réfléchissantes qui nous entourent est devenue malsaine, estime un nouveau groupe de blogueurs. Afin de mettre un terme à cette obsession, ils ont décidé d'entamer un "jeûne du miroir", autrement dit : passer un mois - ou un an - sans regarder son reflet.

La tendance est née aux Etats-Unis sur des sites comme The Beheld, le blog d'Autumn Whitefield-Madrano, une auteure de 36 ans installée à son compte dans le quartier de Queens, à New York. "Je me suis rendu compte que j'adoptais un 'visage miroir' chaque fois que je voyais mon reflet, explique-t-elle : j'ouvrais les yeux un peu plus grand, je rentrais les joues et j'abaissais mon menton pour ressembler un peu plus à ce que je souhaitais. Je me sentais très vaine."

Se sentir "plus calme et plus sereine"

En mai 2011, elle commence son premier mois d'"abstinence du miroir" pour apprendre à se détacher de son reflet. "Ce n'est pas parce que j'étais mal que je voulais faire ça, j'étais juste inquiète du nombre de fois où je pensais à mon apparence. Je voulais voir comment la façon dont je me percevais influençait mon humeur." A la fin du mois, elle confiait qu'elle se sentait "plus calme et plus sereine". Elle reconnaît toutefois que sa deuxième tentative, en juillet 2011, a été plus difficile. Son jeûne du miroir est aujourd'hui un rituel annuel. "C'est une façon de me reconnecter avec moi-même, de me rappeler que je n'ai pas besoin de savoir tout le temps à quoi je ressemble pour être parfaitement opérationnelle."

Une autre blogueuse, Kjerstin Gruys, diplômée en sociologie à l'université de San Francisco, a évité les miroirs durant les douze mois précédant son mariage. Elle explique que l'achat de sa robe de mariée l'a fait "renouer avec un sentiment très désagréable de manque de confiance" concernant son apparence. Elle a donc décidé d'éviter toutes les surfaces réfléchissantes à l'exception des rétroviseurs de voiture et s'est interdit de se prendre en photo. "J'ai appris à mieux séparer apparence et estime de soi, concluait-elle à la fin de son expérience. C'est probablement le meilleur secret pour se sentir belle." Elle écrit à présent un livre relatant son expérience, qui sera publié par Avery.

Une étude publiée il y a quelques mois dans le journal Behaviour Research and Therapy a révélé qu'en Angleterre, les femmes se regardent environ 38 fois par jour dans un miroir, contre 18 fois pour les hommes.

Un effet libérateur, mais seulement momentanément


Philippa Diedrichs, psychologue au Center for Appearance Research à Bristol, souligne que c'est à cause des pressions sociales croissantes pour ressembler à telle ou telle image que certains prennent des mesures radicales pour éviter leur propre reflet. "En matière d'apparence, les idéaux que nous avons aujourd'hui sont inaccessibles pour la plupart des gens. Quand ils s'y comparent, ils sentent qu'ils ne sont pas à la hauteur et sont insatisfaits." Pour elle, le "jeûne du miroir" ne devrait toutefois guère avoir d'impact positif sur la perception du corps. "Quand nous travaillons avec des gens qui ont des problèmes avec leur image corporelle, nous les encourageons plutôt à se regarder davantage dans les miroirs, soit exactement l'inverse de ce 'jeûne', explique-t-elle. Nous les incitons à examiner leur reflet, à se montrer moins critiques sur ce qu'ils voient et à se concentrer sur ce qui leur plaît."

Kate Fox, spécialiste d'anthropologie sociale au Social Issues Research Centre d'Oxford, estime elle aussi que le jeûne du miroir n'est pas constructif. "Il est vrai que le fait d'éviter les miroirs de manière aussi rigoureuse peut avoir un effet momentanément libérateur, déclare-t-elle. Mais c'est un peu le même mécanisme que les régimes où les gens qui s'affament finissent par être encore plus obsédés par la nourriture. Je trouve ça encore plus narcissique que les gens qui se regardent dans le miroir normalement."

Pour elle, les blogs sur le jeûne du miroir ne sont qu'une autre façon d'être obsédé par son apparence. Une opinion que partage Whitefield-Madrano : "Je pense que je suis devenue ultrasensible à ce que je ressentais et j'ai commencé à attribuer chaque sensation à cette expérience. La deuxième fois que je l'ai fait, c'était beaucoup plus difficile. Je me disais : 'Mais ce jeûne du miroir, c'est en soi un reflet de ce que je ressens.'"
Reste que le concept a fait des émules chez les lecteurs. "Nous avons tellement de moyens de contrôler notre image publique sur les réseaux sociaux. Je me demande si une des raisons du succès du jeûne du miroir n'est pas l'attrait qu'il y a à renoncer très largement à ce contrôle. Quand je parle à des gens qui suspendent leur compte Facebook, ils en parlent comme moi du jeûne du miroir : ils parlent de sérénité, de libération, de sentiment de se connaître mieux et de faire le tri dans ses priorités."             
 
 
Source THE GARDIAN


08/09/2012
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