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Sage comme un petit Français (08/09)

 

Américaine établie à Paris, Pamela Druckerman admire l’autorité naturelle qui semble émaner des parents français. Entre candeur et clichés, elle enquête sur ce petit plus qui leur permet d’éviter bien des caprices et des larmes.

 

 

Quand ma fille a eu 18 mois, mon mari et moi avons décidé  de l’emmener pour quelques jours de vacances sur la Côte. Bean, comme nous la surnommons, était notre aînée, aussi veuillez nous pardonner d’avoir songé : “Il n’y a pas de raison que cela se passe mal.”Nous nous sommes rapidement aperçus que manger au restaurant avec une enfant qui commence à marcher était la croix et la bannière.

Au bout de quelques minutes, après s’être brièvement intéressée à son assiette, Bean se mettait à renverser les salières et à déchirer les sachets de sucre. Puis elle exigeait qu’on la descende de sa chaise haute pour pouvoir cavaler à travers  le restaurant et filer vers le port. Notre tactique, en réponse, a été de manger en quatrième vitesse. Nous commandions avant même d’être assis et demandions au serveur de nous apporter entrées et plats en même temps. Pendant que mon mari avalait quelques bouchées de poisson, je veillais à ce que Bean ne soit pas heurtée par un serveur ou ne tombe pas à l’eau. Puis nous échangions les rôles. Et nous laissions des pourboires faramineux pour nous excuser du serpentin de serviettes déchirées  et de calmars au pied de la table.

 

Pas de jérémiades

Après quelques repas soumis aux mêmes affres, j’ai commencé à remarquer que les familles françaises qui nous entouraient ne semblaient pas vivre le même calvaire. Etrangement, elles avaient l’air d’être en vacances. Leurs petits Français semblaient contents dans leur chaise haute. Ils attendaient leur repas, mangeaient du poisson et même des légumes. Ni cris perçants ni jérémiades. Et pas l’ombre d’un détritus au pied des tables.

Je me suis rapidement rendu compte que les différences ne s’arrêtaient pas aux repas. Comment se faisait-il, par exemple, que, durant les centaines d’heures que j’avais passées dans les aires de jeux françaises, je n’avais jamais vu d’enfant piquer une colère ? Pourquoi mes amies françaises n’étaient-elles jamais obligées d’écourter une conversation parce que leurs enfants trépignaient à côté du téléphone ? Pourquoi leurs salons n’étaient-ils pas envahis de tipis et d’ustensiles de dînette, comme le nôtre ?

A Paris, lorsque des familles américaines venaient nous rendre visite, les parents passaient généralement le plus clair de leur temps à arbitrer les chamailleries de leurs enfants, à guider le petit dernier dans l’exploration de l’îlot de la cuisine ou, collés par terre, à construire des villages en Lego. A l’inverse, quand des amis français nous rendaient visite, les adultes prenaient leur café de leur côté tandis que les enfants jouaient tranquillement du leur. J’ai alors décidé de tirer au clair ce que les parents français faisaient différemment. Et, aujourd’hui que Bean a 6 ans et que j’ai des jumeaux qui en ont trois, je peux vous le dire : les Français ne sont pas parfaits, mais ils ont une recette en matière d’éducation qui marche vraiment.

 

L'heure des adultes

Rassurez-vous, je ne souffre pas d’un parti pris profrançais. Au contraire, je ne suis même pas sûre d’aimer vivre ici. Je ne veux en aucun cas que mes enfants deviennent des Parisiens hautains en grandissant. Mais, en dépit de tous ses défauts, la France présente un fort contraste avec les Etats-Unis en matière d’éducation. Les parents français de la classe moyenne (je ne me suis pas intéressée aux très riches ou aux pauvres) parviennent à s’investir dans leur vie de famille sans que cela tourne à l’obsession. Ils partent du principe que même de bons parents ne sont pas constamment au service de leurs enfants, et qu’il n’y a aucun mal à cela. “Pour moi, les soirées sont réservées aux parents, m’a ainsi confié une mère parisienne. Ma fille peut rester avec nous si elle le souhaite, mais c’est l’heure des adultes.”

Naturellement, les Français ont toutes sortes de services publics qui rendent le fait d’avoir des enfants plus attrayant et moins stressant. Les parents n’ont pas à payer pour l’école maternelle, ni à épargner pour envoyer leurs enfants à l’université. Mais ces services publics n’expliquent pas tout. Quand j’ai demandé à des parents français comment ils s’y prenaient pour discipliner leur progéniture, il leur a fallu quelques secondes pour comprendre ce que je voulais dire. “Ah, vous voulez dire comment on les élève ?” m’ont-ils demandé. Le terme “discipline”, devais-je bientôt m’apercevoir, revêt une acception étroite qui évoque la punition et, de ce fait, est rarement employé. Alors que l’éducation (qui n’a rien à voir avec l’école) est à leurs yeux un processus continu.

 

 

 

Source The Wall Street Journal

 

 



08/09/2012
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